vendredi 22 février 2008

Hasselblad H3D MS II


Mardi, PhotoService présentait conjointement avec Hasselbald USA Inc, la nouvelle mouture de leur caméra numérique, la H3D II MS.

Une caméra qui augmente la résolution apparente en faisant disparaître les défauts inhérents à la capture numérique basée sur le démosaïcage du motif Bayer. La capture numérique traditionnelle induit des artéfacts qui n’existaient pas en argentique. Parmi les plus notables : les franges colorées omniprésentes sur l’ensemble de la surface de capture causée par le démosaïquage du motif Bayer afin de « deviner » la composante RGB de chacun des photosites; la génération de moirés causés par l’interaction de la régularité de la répartition des photosites en relation avec les motifs réguliers du sujet photographié (typiquement les tissus) et finalement, une nouvelle forme d’aberration chromatique causée par la trajectoire que doit suivre un rayon lumineux pour atteindre le photosite en traversant la microlentille,le filtre IR, le filtre anticrénelage et enfin le photosite. Toutes ces réfractions sont source de division du rayon lumineux en couleurs parasitaires indésirables en particulier sur les bords de la zone de capture.

Hasselblad a conçu le logiciel Phocus (présentement en phase bêta) qui tente de résoudre tous ces problèmes en dialoguant avec les coordonnées optiques de l’objectif utilisé. Lors de la prise de vue, la focale, l’ouverture et la distance de mise au point sont inscrites dans les métadonnées du fichier raw de sorte que Phocus puisse corriger de façon « instruite » les défauts propres à cette combinaison objectif/capteur. Seul Hasselblad importe la distance de mise au point dans les métadonnées et, considérant que seuls les objectifs Hasselblad peuvent être utilisés sur les boîtiers H3, ils connaissent de façon exhaustive l’ensemble des défauts, tant géométriques que chromatiques, de leurs objectifs. La résultante est la disparition quasi totale des aberrations de périphéries et du flou sous-jacent ainsi que la parfaite correction géométrique des lignes. Ce genre de corrections est particulièrement spectaculaire en prises de vue architecturales où les lignes et la définition des pourtours sont recherchées. Pour l’utilisateur typique, cela se traduit par un fichier plus net qui aurait nécessité probablement un capteur à beaucoup plus haute résolution et une optique beaucoup plus nette afin d’obtenir de tels résultats. La trentaine de mégapixels devient en sorte facilement un gain linéaire de 50 % de plus, ce qui se traduirait par 60 MP + ce qui n’est pas disponible présentement en capture One Shot.

L’autre aspect de la présentation concernait le traitement des moirés où deux solutions sont proposées. Si vous faites de la capture One Shot d’un sujet mobile, un nouvel algorithme de détection des structures mathématiques responsables du motif moiré est utilisé pour faire disparaître le motif et ce, sans pénaliser la netteté apparente. On nous a présenté des motifs parasitaires, sur une jambe de femme recouverte d’un bas de nylon, qui disparaissent sans pour autant affecter la maille même du bas. Cette solution ne se débarrasse pas toujours de tous les moirés, mais en combinant diverses versions de l’image ouverte avec différents réglages de l’outil « correction moirés », on peut régler presque toutes les situations. J’ai personnellement été impressionné par ce démoirage mais, je dois reconnaître que je ne suis pas quelqu’un qui se bat fréquemment contre des moirés. L’autre solution au démoirage, est d’exposer en MS (Multi Shot), c’est à dire de faire quatre prises de vues successives en microdéplaçant latéralement le capteur de la position d’un photosite de sorte qu’au cours des quatre prises de vues, un photosite recouvert de chacun des filtres primaires vient se positionner derrière chacun des points de capture. Cette solution, héritée de la technologie Imacon disponible depuis plusieurs années, permet d’éviter le démosaïcage Bayer et ses artéfacts et moirés typiques. Une résolution supérieure apparente s’en suit ainsi que la disparition des franges colorées propres au démosaïquage. Les moirés sont aussi atténués un peu à la façon d’une numérisation par un numériseur à plat, mais, comme tous ceux qui ont beaucoup numérisé, vous savez que les numériseurs ne sont pas exempts de moirés. On se rapproche des performances des capteurs Foveon sur une plus grande surface avec une profondeur de capture (16 bits) de beaucoup supérieure.

Le prix à payer pour cette superbe qualité (atténuation des moirés, des franges de démosaïquage et des aberrations) tient au Multi Shot qui sous-entend une parfaite stabilité entre les quatre prises de vues qui durent environ 15 secondes au total. Si une des prises de vues n’est pas parfaitement alignée avec les autres, il en résulte une erreur de registre entre les couleurs qui rend l’image inutilisable et la prise de vue doit être refaite. Le plancher du studio de Photo Service ne permettait pas une telle précision et a rendu la démonstration hasardeuse, ce qui en a fait sourciller plus d’un. Cette problématique n’est pas nouvelle, mais propre à tous ces systèmes de multi capture utilisés par les différents fabricants de solutions numériques hautes résolutions depuis plus de 10 ans. On pourrait mentionner les dos Leaf dcb 1, les dos Sinar Micro Scan XY, les dos à balayages, etc. Ce, en quoi cette solution est novatrice, est dans le fait que, contrairement au H2 où le dos n’était qu’utilisable avec le H2, ce dos pourra être adapté à diverses caméras. Toutes les fonctions de corrections propres aux objectifs offertes par le logiciel Phocus, elles, ne seront disponibles que si le dos est sur un H3D. C’est une possibilité supplémentaire si les conditions et le sujet le permettent un peu comme une corde supplémentaire à son arc au cas. Le prix de cette solution est autour des $ 40k et Photo Service pourra vous donner des infos supplémentaires dans ce domaine.

Cette démonstration a prouvé une fois de plus que nous avons atteint, ou sommes proche d’atteindre, les limites optiques et physiques de la capture. Nous nous battons dorénavant contre les limites d’excellentes optiques. Je vous ferai remarquer que les progrès en optiques sont beaucoup plus lents que les progrès dans le domaine des capteurs. Nous n’avons pas pu vraiment apprécier les qualités couleur 16 bits de ce nouveau dos en relation avec les nouvelles solutions 14 bits offertes par différents fabricants nippons. Hasselblad semble avoir enfin compris que d’offrir une solution « fermée » comme le H2 n’était pas très populaire et on nous a annoncé la discontinuation de ce modèle. Le parc des joueurs dans ce format de caméra se rétrécit tous les jours. Je considère qu’il ne reste que PhaseOne, Hasselblad et Leaf. La grande compétition de ces produits est en fait la Canon 1Ds mk III pour une fraction du prix. Pendant combien de temps encore les grandes agences de pub seront-elles impressionnées par de telles solutions? Il fut une époque où le matériel entre les photographes n’était pas si différent et ce que les agences engageaient était le photographe et non pas sa caméra. Je souhaite et recommande un retour vers cette approche, car tant que la course et l’accent seront sur la différenciation matérielle, notre pérennité ne sera pas assurée, car rien n’est plus éphémère qu’une caméra et le modèle qui suit. Il faut divertir le client de la caméra et cet exercice en est un nouveau considérant les dernières années où la question de l’équipement a souvent occupé le premier plan.


Greg Hollmann, spécialiste technique chez Hasselblad USA présentant le logiciel Phocus et la caméra H3D MSII, photo Martin Benoit

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